Image 1. Usine de gaz naturel liquéfié (GNL).
Des capteurs intelligents, sans fil, pour les machines tournantes sont désormais déployés dans des milliers d'installations à travers le monde. Cependant, la conception d'une solution efficace et facile à déployer pour les moteurs et les pompes, fonctionnant dans des zones dangereuses, répresente un véritable défi. Il s'agit de zones où la présence de vapeurs ou de gaz inflammables nécessite de précautions particulières afin d'éviter le risque d'explosion.
L'absence de tels capteurs a limité la gamme de machines pouvant être surveillées à distance ainsi que la capacité à obtenir des informations significatives sur la santé et la performance des moteurs (faisant fonctionner des équipements tels que les pompes, ventilateurs et compresseurs). Cette absence a également entraîné un risque accru pour la sécurité des opérateurs qui doivent s'aventurer dans les zones dangereuses des usines afin d'effectuer la surveillance de l'état des équipements.
Cependant, une nouvelle génération de capteurs intelligents a été développée par ABB. Ces capteurs sont spécialement conçus pour les équipements rotatifs, fonctionnant en atmosphères explosives. Cela permet aux opérateurs d'industries comme la chimie, la pétrochimie ou encore le gaz, de bénéficier d'une surveillance des conditions économiques au travers d'une large variété d'applications.
LES FONCTIONS DES CAPTEURS INTELLIGENTS POUR LES ZONES DANGEREUSES
Les capteurs intelligents pour les zones dangereuses surveillent les paramètres clés des équipements tels que les moteurs et les pompes. Ils fournissent des informations détaillées sur leur performance et leur état de santé. Cela comprend la collecte d'informations sur la puissance et la consommation d'énergie, permettant d'identifier les possibilités d'économies d'énergie pouvant atteindre 10 %. Les capteurs peuvent également indiquer la nécessité d'opérations de maintenance spécifiques, comme dans le cas d'un roulement qui a besoin d'être regraissé.
Les données recueillies par les capteurs intelligents peuvent aider à prédire une défaillance potentielle, de sorte que des mesures préventives puissent être prises avant qu'une panne ne se produise. Cela permet d'éviter les temps d'arrêt imprévus et de réduire les coûts de maintenance. La maintenance prédictive est bien moins coûteuse et moins perturbatrice que la maintenance réactive.
L' utilisation de capteurs intelligents permet également de surveiller à distance et en toute sécurité des équipements installés dans des endroits difficiles ou dangereux d'accès. Par conséquent, les employés ne seront plus obligés de se rendre dans des lieux à risque, ce qui augmente leur securité.
Cette nouvelle génération de capteurs intelligents intègre également un microprocesseur à la fois plus rapide et robuste que les modèles précédents. Il dispose également d'une mémoire de travail et stockage interne plus importante ainsi que d'une autonomie de batterie jusqu'à trois fois supérieure à celle de nombreux modèles concurrents. Il peut communiquer avec des smartphones, des tablettes, des PC et des passerelles via le Bluetooth ou le Wireless HART.
Une nouvelle conception d'antenne assure une communication fiable, sur des distances allant jusqu'à plusieurs centaines de mètres. Le nouveau capteur est également caractérisé par une sensibilité plus accrue envers les petits changements, pour ce qui concerne l'état des équipement y compris les alertes en cas d'endommagement des roulements.
LA CONCEPTION POUR LES ZONES DANGEREUSES
Les capteurs intelligents pour les zones dangereuses doivent relever plusieurs défis de conception. Ils doivent mesurer les vibrations à haute fréquence, démontrer une résistance physique à des conditions difficiles et dangereuses ainsi qu'avoir une longue durée de vie.
Alors que de nombreux autres capteurs ne mesurent que les vibrations et la température, l'Ability Smart Sensor mesure également les vibrations à haute fréquence, les champs magnétiques, la température et l'acoustique. Il peut ainsi mesurer la vitesse et la rotation des moteurs avec une extrême précision.
Pour obtenir la qualification et opérer dans des zones dangereuses, les capteurs doivent répondre à des exigences de conception spécifiques. Ils doivent également respecter un grand nombre de normes. Par exemple, ils doivent s'assurer qu'un court-circuit interne dans la batterie ne provoquera pas un réchauffement susceptible d'enflammer le gaz. Lorsque des capteurs sont court-circuités pendant les essais, ils doivent atteindre une température ne dépassant pas les 135°C (la norme de la classe de température T4).
Le boîtier du capteur ne doit pas comporter de composants qui génèrent de la chaleur ou des étincelles. Pour ce faire, les capteurs doivent être remplis d'un matériel conducteur afin d'éviter les étincelles ou la propagation de la chaleur si l'enceinte est compromise. De plus, le capteur doit être capable de supporter les contraintes qui découlent de son environnement. Ce capteur intelligent a été conçu pour fonctionner dans une plage de température allant de -40°C à +85°C, comme c'est le cas pour la plupart des composants électroniques industriels. Cependant, il peut fonctionner dans une plage de -70°C à +130°C. Cela a été déterminé par des tests de durée de vie hautement accélérés (HALT), qui utilisent des cycles de haute et basse température et une combinaison de vibrations élevées et des températures extrêmes, afin de vérifier la résilience du capteur.
VIBRATION
Image 2. Banc d'essai de capteurs pour les zones dangereuse.
Les capteurs de vibration sont de plus en plus courants dans l'électronique grand public et l'automatisation industrielle. Cependant, il n'est pas facile de créer un capteur de vibrations de haute qualité. Par exemple, il est essentiel d'empêcher les résonances qui se produisent n'importe où dans le corps du capteur. De nombreux aspects rendent le problème plus difficile à résoudre tels que le positionnement, les supports de montage, la méthode de fixation ou encore son côut.
La première approche d'ABB pour le nouveau capteur consistait à utiliser une grande plaque d'acier emboutie au bas du capteur pour transmettre les vibrations de la manière la plus directe possible. Le capteur avait deux cartes électroniques, l'une collée à la plaque métallique et l'autre connectée à la plaque. Cette première version de la plaque métallique offrait des performances médiocres en matière d'autorésonance. Les forces de résonance du corps du capteur se sont propagées à la base en métal embouti et elles ont été captées par les transducteurs de vibration.
Cependant, en utilisant un modèle à grain et de la plaque métallique, de nombreuses alternatives ont été simulées. Cela a permis d'obtenir une plaque métallique qui colle complètement à la machine (sans propager les forces de vibration du corps du capteur à l'emplacement des transducteurs de vibration) et capable également de maintenir les objectifs de coût.
BATTERIES
Les batteries répresentent un problème particulier pour les capteurs sans fil, fonctionnant dans des zones dangereuses. Les piles remplaçables ou rechargeables ne sont pas souhaitables car :
- Des piles remplaçables peuvent augmenter le coût du capteur au point qu'il est plus convenanble de changer de capteur et de se procurer de nouveaux composants électroniques plus performants.
- Il existe un risque que l'utilisateur puisse compromette le statut de protection des zones dangereuses, en insérant de manière incorrecte les nouvelles piles .
- La protection contre la poussière et l'eau pourrait également être compromise si les piles ne sont pas remplacées correctement. L'objectif d'ABB était de concevoir un système embarqué dont la durée de vie pourrait atteindre 15 ans, tout en fournissant un indicateur fiable concernant la durée de la vie restante des batteries.
Cela a été difficile pour trois raisons :
- Limiter le courant de fuite interne de la batterie. La température subie par la batterie doit être modérée.
- Eviter que les pastilles soudées ne se cassent. Les forces de vibration de la batterie et du capteur ne doivent pas se propager à l'interface entre les deux.
- La consommation électrique du capteur doit être maintenue à un faible niveau, même avec une batterie de grande capacité.
Dans le nouveau capteur intelligent, la batterie et ses plots soudés sont enfermés dans un support qui est séparé des sources de chaleur primaires par un espace d'air, ce qui le protège de la chaleur provenant de l'équipement surveillé.
Pour évaluer le courant de fuite de la batterie en fonction de la température, le capteur mesure la température de la batterie pendant son fonctionnement et il estime le courant de fuite correspondant sur la base d'un modèle de batterie éprouvé.
Image 3. Capteurs de danger montés sur moteur.
Dans une autre méthode de mesure de la charge de la batterie, le "firmware" utilise un système de points pour calculer la charge consommée par le fonctionnement normal des capteurs. La plupart du temps, le capteur est en stand-by et consomme très peu d'énergie. Lorsque le capteur se déclenche, sa consommation d'énergie augmente. Le capteur enregistre la durée de chaque opération consommatrice de batterie (par exemple, la durée d'activité de la puce Bluetooth). A partir des durées et des courbes de puissance des opérations, la charge consommée est calculée et soustraitée de la capacité initiale de la batterie. Sur la base d'une valeur moyenne mobile de la consommation, la durée de vie restante est estimée et publiée. Cette approche tient compte de l'utilisation réelle de la batterie plutôt que de la durée de vie prédéfinie et des niveaux de consommation électrique supposés, souvent inexacts.
L'ÉPREUVE DU TEMPS
Le firmware et le software du nouveau Smart Sensor ont deux objectifs principaux : soutenir la création de différents types de capteurs à l'avenir et permettre la reconfiguration d'un capteur déployé pour la surveillance de divers types d'équipements. À titre d'exemple de ce dernier objectif, un nouveau capteur pourrait être reconfiguré afin d'être utilisé soit comme capteur de moteur / pompe soit pour tout autre type de bien, caractérisé par la sélection de profils de machines prédéfinis ou personnalisés. Le firmware du capteur peut être facilement adapté à de nouvelles exigences grâce à une architecture logicielle flexible qui découple les composants individuels de la plateforme du matériel/système d'exploitation. Ces composants communiquent à l'aide d'un middleware de publication et d'abonnement. Dans l'ensemble, le firmware est organisé comme une ligne de produits logiciels. Il convient donc à la création de nouvelles variantes de capteurs basées sur la même plateforme sous-jacente.
Comme pour tous les capteurs sans fil, les fonctions de cybersécurité sont essentielles. Les Ability Smart Sensor comprennent l'échange sécurisé de clés pour la communication Bluetooth avec couplage hors bande, le cryptage Bluetooth, l'authentification des utilisateurs, le contrôle d'accès basé sur les rôles et la mise à jour sécurisée des firmware.
UN REGARD VERS L'AVENIR
Le cœur de l'industrie 4.0, l'Internet industriel des objets (IIoT) et la maintenance prédictive (PdM) c'est un réseau omniprésent de capteurs qui fournissent des données de haute qualité. Sans capteurs, sans fil pouvant fonctionner en toute sécurité dans les zones dangereuses, ces réseaux seraient incomplets. En effet, la surveillance des machines dans les zones dangereuses est plus importante que toute autre surveillance car ces machines doivent être maintenues isolées de leur environnement en toute sécurité.
Cet article a été écrit par Teijo Karna, Global Product Manager, ABB Ability™ Smart Sensor.