Tarak Mehta, Président d'ABB Électrification
À deux semaines de la conférence de l’ONU sur les changements climatiques (COP26), j’ai eu le plaisir de participer à la table ronde du TIME magazine intitulé « Relever les défis énergétiques mondiaux » avec le modérateur Mark Barton, Antoine Jourdain, Chef de la technologie, pour Enedis, et Timur Gül, Chef de la politique en matière de technologies énergétiques à l’Agence internationale de l’énergie (International Energy Agency [IEA]).
Il s’agit d’une discussion importante sur une partie largement négligée de la transition énergétique et de l’atteinte de la carboneutralité : le réseau électrique.
L’électrification propre est bien sûr un pilier majeur de l’objectif de carboneutralité d’ici 2050 de l’IEA. Il permettrait d’éliminer près de trois quarts des émissions mondiales dans les secteurs du bâtiment, de l’industrie et du transport.
De toute évidence, notre premier défi est de rendre cette électricité vraiment propre. Cela signifie que d’ici 2040, 90 % de l’électricité doit provenir de sources renouvelables. Nous avons déjà réalisé d’énormes progrès à l’échelle mondiale, en produisant 29 % de l’électricité à partir de sources renouvelables. Nous avons encore du travail à accomplir, mais nous sommes sur la bonne voie.
Le deuxième défi nécessite beaucoup plus d’attention : nous devons adapter nos réseaux électriques pour qu’ils puissent traiter cette énergie renouvelable. Le réseau électrique actuel n’étant pas conçu pour supporter des sources d’énergie variables, il ne peut pas capter et utiliser toutes les énergies renouvelables. Nous gaspillons l’énergie renouvelable, puis recourons aux combustibles fossiles comme solution de secours lorsque l’énergie de sources solaire et éolienne est faible. Nous ne pouvons pas nous le permettre.
Le troisième défi est la complexité du réseau moderne. Pendant près de 85 ans, le réseau a été une autoroute à sens unique. Aujourd’hui, il est en train de devenir une intersection. Pour vous donner une idée de ce qui arrive au réseau électrique, imaginez le célèbre Carrefour de Shibuya à Tokyo.
Le réseau doit pouvoir prendre en charge de nouveaux sites de demande, notamment celui des véhicules électriques (VE). Il prend également en charge les nouveaux sites d’approvisionnement, tels que les panneaux solaires domestiques et le stockage par batterie, de même que les VE équipés d’un système de recharge véhicule-réseau (V2G pour « vehicle-to-grid »), comme les 4 000 VE qui réinjectent de l’électricité dans le réseau de la marque Nissan Leaf en France, grâce à notre partenariat avec DREEV.
Le quatrième défi est la demande croissante d’électricité, qui fera plus que doubler d’ici 2050. Par exemple, il est évident que l’électrification des transports est essentielle pour atteindre l’objectif de carboneutralité, mais il faut aussi prendre en compte que chaque voiture électrique consomme autant d’électricité qu’une maison. Uniquement pour les VE, nous devrons soit doubler les infrastructures (par exemple, en France, passer de plus de 1,4 million de kilomètres de câbles à 2,8 millions), soit gérer les infrastructures existantes de manière plus judicieuse grâce à la technologie de réseau intelligent.
La bonne nouvelle, c’est que la numérisation permet de résoudre ces trois enjeux de réseau. Les réseaux intelligents relient tous ces sites d’offre et de demande pour rendre la demande plus flexible. Ils recourent à l’intelligence artificielle (IA) pour déplacer automatiquement la demande provenant des bâtiments et des VE à des périodes où l’énergie renouvelable est disponible, afin d’utiliser toute cette énergie produite. Ensuite, les réseaux intelligents ajoutent de la capacité au réseau, en y réinjectant de l’électricité, lorsque l’énergie solaire et éolienne est faible. La Commission européenne estime que la flexibilité du réseau intelligent permettrait d’économiser des milliards par an dans l’Union européenne d’ici 2030, en évitant une expansion non nécessaire des infrastructures.
Quelle sera l’efficacité des réseaux intelligents pour aider 137 pays dans le monde à respecter leurs engagements pour réaliser l’objectif de carboneutralité?
Voyons l’exemple de la Finlande. Ce pays vise la carboneutralité d’ici 2035. Au cœur de ce plan se trouve son programme national d’électrification verte 2035. L’agence gouvernementale Business Finland a lancé le programme en 2020, en confiant ABB ainsi qu’à d’autres partenaires le mandat de concevoir une nouvelle plate-forme numérique 5G qui fournira une électricité sûre, fiable et neutre en carbone à toute la Finlande d’ici 2035.
ABB utilisera le même concept de plate-forme dans le cadre de son partenariat avec UK Power Networks, ajoutant suffisamment d’électricité pour alimenter 1,4 million de foyers. Cela permettra également d’accroître l’accès aux énergies renouvelables et de réduire un volume d’émissions équivalant à celui du chauffage de 6,5 millions de foyers. C’est là une étape importante qui rapproche le Royaume-Uni de l’objectif de carboneutralité d’ici 2050.
COP26
Il est facile d’opérer un virage des politiques en faveur des énergies renouvelables. Pour que ce soit possible, nous devons nous engager dès maintenant à investir dans l’infrastructure du réseau pour être en mesure de prendre en charge ces énergies renouvelables.
Cependant, la COP26 ne concerne pas uniquement la contribution des gouvernements. Elle porte sur ce que nous pouvons faire en tant que citoyens du monde. Elle concerne notre manière de conduire et de nous déplacer, ainsi que de chauffer nos maisons. Ensemble, nous pouvons atteindre la carboneutralité, limiter le réchauffement climatique à 1,5° et rendre le monde plus sûr et meilleur pour nos enfants ainsi que pour les générations futures.
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